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1re
Station
Jésus est condamné à mort par Pilate
"Jésus
est debout devant le gouverneur romain." Il est debout, parce
que, second Adam, il est le chef de toute la race qu'il va racheter
par son immolation. Le premier Adam, avait, par son péché,
mérité la mort". Jésus, innocent, mais
chargé des péchés du monde, doit les expier
par son sacrifice sanglant. Les princes des prêtres, les
pharisiens, son propre peuple "l'entourent comme des taureaux
furieux". Nos péchés crient par leurs clameurs
et exigent tumultueusement la mort du juste. Le lâche gouverneur
romain "leur livre la victime pour qu'elle soit attaché
à la croix".
Que fait Jésus? S'il est debout parce qu'il est notre chef;
si, comme dit saint Paul, "il rend témoignage"
de la vérité de sa doctrine, de la divinité
de sa personne et de sa mission, il s'abaisse cependant intérieurement
devant l'arrêt prononcé par Pilate: il lui reconnaît
un pouvoir authentique. Dans cette puissance terrestre, indigne
mais légitime, Jésus voit la majesté de son
Père. Et que fait-il? Il se livre plus qu'il n'est livré.
Il s'humilie en obéissant jusqu'à la mort; il accepte
volontairement pour nous, afin de nous rendre la vie, la sentence
de condamnation.
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"De même que la désobéissance d'un
seul homme, Adam, a entraîné la perte d'un grand
nombre, ainsi l'obéissance d'un seul, le Christ Jésus,
les établira dans la justice."
Nous
devons nous unir à Jésus dans son obéissance,
accepter tout ce que notre Père des cieux nous imposera
par qui que ce soit, un Hérode ou un Pilate, du moment
que leur autorité est légitime. - Acceptons
aussi, dès maintenant, la mort, en expiation de nos
péchés, avec toutes les circonstances dont il
plaira à la Providence de l'entourer; acceptons-la
comme un hommage rendu à la justice et à la
sainteté divines outragées par nos fautes; unie
à celle de Jésus, elle deviendra "précieuse
aux yeux du Seigneur".
Mon divin Maître, je m'unis à votre Cur
sacré dans sa soumission parfaite et son abandon entier
aux volontés du Père. Que la vertu de votre
grâce produise en mon âme cet esprit de soumission
qui me livre sans réserve et sans murmure au bon plaisir
d'en haut, à tout ce qu'il vous plaira de m'envoyer
à l'heure où je devrai quitter ce monde.
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2e
Station
Jésus est chargé de sa croix
"Pilate
leur livra Jésus pour être crucifié, et ils
l'emmenèrent portant sa croix." Jésus avait
fait un acte d'obéissance; il s'était livré
aux volontés de son Père, et maintenant le Père
lui montre ce que l'obéissance lui impose: c'est la croix.
Il l'accepte comme venant des mains de son Père, avec tout
ce qu'elle comporte de douleurs et d'ignominies. En cet instant,
Jésus acceptait le surcroît de souffrances qu'apportait
ce lourd fardeau à ses épaules meurtries, les tortures
indicibles dont ses membres sacrés seraient affligés
au moment de la crucifixion; il acceptait les amers sarcasmes,
les haineux blasphèmes, dont ses pires ennemis, en apparence
triomphants, allaient l'accabler aussitôt qu'ils le verraient
suspendu au gibet infâme; il acceptait l'agonie de trois
heures, l'abandon de son Père... Nous n'approfondirons
jamais l'abîme d'afflictions auxquelles notre divin Sauveur
a consenti en recevant la croix. - En ce moment aussi, le Christ
Jésus, qui nous représentait tous, et qui allait
mourir pour nous, acceptait la croix pour tous ses
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membres,
pour chacun de nous. Il a uni alors aux siennes toutes les souffrances
de son Corps mystique; il leur a fait puiser dans cette union
leur valeur et leur prix.
Acceptons donc notre croix en union avec lui, comme lui, pour
être de dignes disciples de ce chef divin; acceptons-la
sans raisonner, sans murmurer; si lourde qu'ait été
pour Jésus la croix que le Père lui imposait, a-t-elle
diminué son amour, sa confiance envers son Père?
Bien au contraire. "Je boirai le calice d'amertume que mon
Père me présente." Qu'il en soit ainsi de nous.
"Si quelqu'un veut être mon disciple, qu'il prenne
sa croix et me suive." Ne soyons pas de ceux que saint Paul
appelle "ennemis de la croix de Jésus". Prenons
plutôt notre croix, celle que Dieu nous impose; dans l'acceptation
généreuse de cette croix, nous trouverons la paix:
rien ne pacifie tant l'âme qui souffre, que cet abandon
entier au bon plaisir de Dieu.
Mon Jésus, j'accepte toutes les croix, toutes les contradictions,
toutes les adversités que le Père m'a destinées;
que l'onction de votre grâce me donne la force de porter
ces croix avec le même abandon que vous nous avez montré
en recevant la vôtre pour nous. "Que je ne cherche
ma gloire qu'en la participation à vos souffrances!"
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3e
Station
Jésus tombe une première fois
"Il
sera un homme de douleurs et il connaîtra la faiblesse."
- Cette prophétie d'Isaïe s'accomplit à la
lettre. Jésus, épuisé par les souffrances
de l'âme et du corps, succombe sous le poids de la croix:
la toute-puissance tombe de faiblesse. Cette faiblesse de Jésus
honore sa puissance divine. Par elle, il expie nos péchés,
il répare les révoltes de notre orgueil et il relève
le monde impuissant à se sauver... De plus, il nous méritait
à ce moment la grâce de nous humilier de nos fautes,
de reconnaître nos chutes, de les avouer sincèrement;
il nous méritait la grâce de la force qui soutient
notre faiblesse.
Avec le Christ prosterné devant son Père, détestons
les élèvements de notre vanité et de notre
ambition;
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reconnaissons
l'étendue de notre faiblesse. Autant Dieu accable les superbes,
autant l'humble aveu de notre infirmité attire sa miséricorde.
Crions miséricorde à Dieu dans les moments où
nous sentons que nous sommes faibles en face de la croix, de la
tentation, de l'accomplissement de la volonté divine. C'est
en proclamant alors humblement notre infirmité qu'éclatera
en nous le triomphe de la grâce qui, seule, peut nous sauver.
Ô Christ Jésus, prosterné sous votre croix,
je vous adore. "Force de Dieu", vous vous montrez accablé
de faiblesse pour nous apprendre l'humilité et confondre
nos orgueils. Ô pontife, plein de sainteté, qui avez
passé par nos épreuves afin de nous ressembler et
de pouvoir "compatir à nos infirmités",
ne m'abandonnez pas moi-même, car je ne suis que faiblesse;
"que votre force demeure en moi", afin que je ne succombe
pas au mal.
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4e
Station
Jésus rencontre sa Mère
Le
jour est venu pour la Vierge Marie où doit se réaliser
pleinement en elle la prophétie de Siméon: "Un
glaive percera votre âme." - De même qu'elle
s'était unie à Jésus en l'offrant jadis au
Temple, elle veut plus que jamais entrer dans ses sentiments et
partager ses souffrances, à cette heure où Jésus
va consommer son sacrifice. Elle se rend au Calvaire où
elle sait que son Fils doit être crucifié. Sur la
route, elle le rencontre. Quelle immense douleur de le voir dans
cet affreux état! Leurs regards s'échangent, et
l'abîme des souffrances de Jésus appelle l'abîme
de la compassion de sa Mère. Que
ne ferait-elle pas pour lui?
Cette rencontre fut à la fois une source de douleur et
un principe de joie pour Jésus. Une douleur, en voyant
la profonde désolation en laquelle son état si triste
plongeait l'âme de sa mère; une joie, à la
pensée que ses souffrances allaient payer le prix de tous
les privilèges dont elle était et devait être
comblée. C'est pourquoi il s'arrête à peine.
Le Christ avait le cur le plus tendre qui soit; au tombeau
de Lazare, il versait des larmes; il pleurait sur les malheurs
de Jérusalem. Jamais fils n'a aimé sa mère
comme lui; quand il l'a rencontrée si désolée
sur la route du Calvaire, il a dû sentir s'émouvoir
toutes les fibres de son Cur. Et pourtant, il passe outre,
il continue son chemin vers le lieu de son supplice, parce que
c'est la volonté de son Père. Marie s'associe à
ce sentiment, elle sait que tout
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doit
s'accomplir pour notre salut; elle prend sa part des souffrances
de Jésus en le suivant jusqu'au Golgotha, où elle
deviendra corédemptrice.
Rien d'humain ne doit nous retenir dans notre marche vers Dieu;
aucun amour naturel ne doit entraver notre amour pour le Christ:
nous devons passer outre pour lui demeurer unis.
Demandons à la Vierge de nous associer à la contemplation
des souffrances de Jésus et de nous donner part à
la compassion qu'elle lui témoigne, afin d'y puiser la
haine du péché qui a exigé une telle expiation.
Il a plu parfois à Dieu, pour manifester sensiblement le
fruit que produit la contemplation de la Passion, d'imprimer dans
le corps de quelques saints, comme saint François d'Assise,
les stigmates des plaies de Jésus. Nous ne devons pas désirer
ces marques extérieures; mais nous devons demander que
l'image du Christ souffrant soit imprimée dans notre cur.
Sollicitons de la Vierge cette grâce précieuse: Mère
sainte, daigne imprimer les plaies de Jésus crucifié
en mon cur très fortement.
Ô Mère, voilà votre Fils; par l'amour que
vous lui portez, faites que le souvenir de ses souffrances nous
suive partout; c'est en son nom que nous vous le demandons; nous
le refuser serait le refuser à lui-même puisque nous
sommes ses membres. Ô Christ Jésus, voilà
votre Mère; à cause d'elle, accordez-nous de compatir
à vos douleurs pour vous devenir semblables.
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5e
Station
Simon le Cyrénéen aide Jésus
à porter sa croix
"Comme
ils sortaient, ils rencontrèrent un homme de Cyrène,
nommé Simon, qu'ils réquisitionnèrent pour
porter la croix de Jésus." Jésus est épuisé;
bien qu'il soit le Tout-Puissant, il veut que sa sainte humanité,
chargée de tous les péchés du monde, éprouve
le poids de la justice et de l'expiation. Mais il veut que nous
l'aidions à porter sa croix. Simon nous représente
tous, et c'est à nous tous que le Christ demande de partager
ses souffrances: on n'est son disciple qu'à cette condition.
"Si quelqu'un veut marcher sur mes traces, qu'il prenne sa
croix et qu'il me suive." Le Père a décidé
qu'une part de douleurs serait laissée au Corps mystique
de son Fils, qu'une portion de l'expiation serait subie par ses
membres. Jésus le veut ainsi, et c'est pour signifier ce
décret divin qu'il a accepté l'aide du Cyrénéen.
Mais en même temps, il nous a mérité en ce
moment la grâce de la force pour soutenir généreusement
les épreuves: il a mis dans sa croix l'onction qui rend
la nôtre tolérable; car en portant notre croix, c'est
bien la sienne que nous acceptons. Il unit nos souffrances à
sa douleur, et il leur confère, par cette union, une valeur
inestimable, source de grands mérites. "Comme ma divinité
a attiré à soi, disait notre Seigneur à sainte
Mechtilde, les
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souffrances
de mon humanité et les a faites siennes (c'est la dot de
l'épouse), ainsi je transporterai tes peines dans ma divinité,
je les unirai à ma Passion, et je te ferai participer à
cette gloire que mon Père a conférée à
ma sainte humanité pour toutes ses souffrances."
C'est ce que saint Paul nous fait entendre dans sa lettre aux
Hébreux afin de nous encourager à tout supporter
pour l'amour du Christ: "Courons avec persévérance
dans la carrière qui nous est ouverte, les yeux fixés
sur Jésus, le guide et le consommateur de la foi; au lieu
de la joie qui lui était offerte, méprisant l'ignominie,
il a souffert la croix, et, depuis lors, il a mérité
d'être assis à la droite du trône de Dieu.
- Considérez celui qui a supporté contre sa personne
une si grande contradiction de la part des pécheurs afin
de ne pas vous laisser abattre par le découragement."
Mon Jésus, j'accepte de votre main les parcelles que vous
détachez pour moi de votre croix; j'accepte toutes les
contrariétés, les contradictions, les peines, les
douleurs que vous permettez ou qu'il vous plaît de m'envoyer;
je les accepte comme part d'expiation; unissez ce peu que je fais
à vos souffrances indicibles, car c'est d'elles que les
miennes tireront tout leur mérite.
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6e
Station
Une femme essuie le visage de Jésus
La
tradition rapporte qu'une femme, prise de compassion, s'approcha
de Jésus et lui tendit un linge pour essuyer sa face adorable.
Isaïe avait prédit de Jésus souffrant qu'"il
n'aurait plus ni forme ni beauté, qu'il serait rendu méconnaissable".
L'Évangile nous dit que les soldats lui donnaient d'insolents
soufflets, qu'ils lui crachaient à la face; le couronnement
d'épines avait fait découler le sang sur sa figure
sacrée. Le Christ Jésus a voulu souffrir tout cela
pour expier nos péchés; "il a voulu nous guérir
par les meurtrissures" qu'a subies sa face divine.
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Etant notre frère aîné, il nous a rendu, en
se substituant à nous dans sa Passion, la grâce qui
fait de nous les enfants de son Père. Nous devons lui être
semblables, puisque telle est la forme même de notre prédestination.
Comment cela? Tout défiguré qu'il est par nos péchés,
le Christ dans sa Passion demeure le Fils bien-aimé, objet
de toutes les complaisances de son Père. Nous lui sommes
semblables en cela, si nous gardons en nous la grâce sanctifiante
qui est le principe de notre similitude divine. Nous lui sommes
semblables encore en pratiquant les vertus qu'il manifeste durant
sa Passion, en partageant l'amour qu'il porte à son Père
et aux âmes, sa patience, sa force, sa mansuétude,
sa douceur.
Ô Père céleste, en retour des meurtrissures
que votre Fils Jésus a voulu souffrir pour nous, glorifiez-le,
élevez-le, donnez-lui cette splendeur qu'il a méritée
lorsque sa face adorable a été défigurée
pour notre salut.
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7e
Station
Jésus tombe une deuxième fois
Considérons
notre divin Sauveur succombant encore sous le poids de sa croix.
"Dieu a placé sur ses épaules tous les péchés
du monde." Ce sont nos péchés qui l'écrasent;
il les voit tous dans leur multitude et leur détail,
il les accepte comme siens au point de ne paraître plus,
selon la parole même de saint Paul, qu'un péché
vivant. Comme Verbe éternel, Jésus est tout-puissant;
mais il veut éprouver toute la faiblesse d'une humanité
écrasée: cette faiblesse toute volontaire honore
la justice de son Père céleste, et nous mérite
la force.
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N'oublions
jamais nos infirmités; ne nous laissons jamais aller à
l'orgueil; si grands progrès que nous croyions avoir réalisés,
nous demeurons toujours faibles pour porter notre croix à
la suite de Jésus. Seule, la vertu divine qui découle
de lui devient notre force; mais elle ne nous est donnée
que si nous l'implorons souvent.
Ô Jésus, rendu faible pour mon amour, écrasé
sous le poids de mes péchés, donnez-moi la force
qui est en vous, afin que vous seul soyez glorifié par
mes oeuvres!
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8e
Station
Jésus parle aux femmes de Jérusalem
"Jésus
était suivi d'une grande foule de peuple et de femmes qui
se frappaient la poitrine et se lamentaient sur lui. Se tournant
vers elles, Jésus dit: Filles de Jérusalem, ne pleurez
pas sur moi, mais pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants,
car des jours viendront où l'on dira: Bienheureuses celles
qui furent stériles... Et les hommes crieront aux montagnes:
Tombez sur nous... Car si le bois vert est ainsi traité,
que fera-t-on du bois sec?"
Jésus connaît les exigences ineffables de la justice
et de la sainteté de son Père. Il rappelle aux filles
de Jérusalem que cette justice et cette sainteté
sont des perfections adorables de l'Être divin. Lui, il
est un "pontife saint, innocent, pur, séparé
des pécheurs"; il ne fait que se substituer à
eux; et pourtant, voyez de quelles atteintes rigoureuses la divine
justice le frappe. Si cette justice réclame de lui une
expiation si étendue, quelle sera la force
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de ses coups contre les coupables qui auront obstinément
refusé jusqu'au dernier jour d'unir leur part d'expiation
aux souffrances du Christ? Ce jour-là, la confusion de
l'orgueil humain sera si profonde, le supplice de ceux qui n'auront
pas voulu de Dieu si terrible que ces malheureux, rejetés
loin de Dieu pour toujours, grinceront des dents de désespoir;
ils demanderont "aux collines de les couvrir", comme
si elles pouvaient les dérober aux traits enflammés
d'une justice dont ils reconnaissent avec évidence l'entière
équité...
Implorons la miséricorde de Jésus pour le jour redoutable
où il viendra non plus en victime ployant sous le poids
de nos péchés, mais en juge souverain "à
qui le Père a remis toute puissance".
Ô mon Jésus, faites-moi miséricorde! Ô
vous, qui êtes la vigne, donnez-moi de demeurer uni à
vous par la grâce et mes bonnes uvres, afin que je
porte des fruits dignes de vous; que je ne devienne pas, par mes
péchés, "une branche morte, bonne à
être retranchée et jetée au feu".
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9e
Station
Jésus tombe une troisième fois
"Dieu,
disait Isaïe, en parlant du Christ durant sa Passion, a voulu
le briser par la souffrance." Jésus est écrasé
par la justice. Nous ne pourrons jamais, même au ciel, mesurer
ce que fut pour Jésus, que d'être soumis aux traits
de la justice divine. Aucune créature, pas même les
damnés, n'en a porté le poids dans toute sa plénitude.
Mais la sainte humanité de Jésus, unie à
cette justice divine par un contact immédiat, en a subi
toute la puissance et toute la rigueur. C'est pourquoi, victime
qui s'est
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livrée par amour à tous ses coups, il est brisé
par l'accablement que fait peser sur lui cette justice sainte.
Ô mon Jésus, apprenez-moi à détester
le péché qui oblige la justice à réclamer
de vous une telle expiation! Donnez-moi d'unir à vos
souffrances toutes mes peines, afin que par elles je puisse
effacer mes fautes et satisfaire dès ici-bas.
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10e
Station
Jésus est dépouillé de ses vêtements
"Ils
se sont partagé mes vêtements et ils ont tiré
ma robe au sort." C'est la prophétie du psalmiste.
- Jésus est dépouillé de tout et mis dans
la nudité d'une pauvreté absolue, il ne dispose
pas même de ses vêtements; car dès qu'il sera
élevé en croix, les soldats se les partageront et
jetteront sa tunique au sort. - Jésus, par un mouvement
de l'Esprit Saint, s'abandonne à ses bourreaux comme victime
pour nos péchés.
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Rien n'est si glorieux pour Dieu ni si utile pour nos âmes
que d'unir l'offrande absolue et sans condition de nous-mêmes
à celle qu'a faite Jésus au moment où il
s'abandonnait aux bourreaux pour être dépouillé
de ses vêtements et attaché à la croix "afin
de nous rendre, par son dénuement, les richesses de sa
grâce". Cette offrande de nous-mêmes est un véritable
sacrifice; cette immolation à la volonté divine
est le fond de toute la vie spirituelle. Mais pour qu'elle acquière
toute sa valeur, nous devons l'unir à celle de Jésus,
car "c'est par cette oblation qu'il nous a tous sanctifiés".
Ô mon Jésus, agréez l'offrande que je vous
fais de tout mon être, joignez-la à celle que vous
avez faite à votre Père céleste, au moment
où vous êtes arrivé au Calvaire; dépouillez-moi
de toute attache à la créature et à moi-même!
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11e
Station
Jésus est attaché à la croix
"Ils
le crucifièrent et deux autres avec lui, un de chaque côté,
et Jésus au milieu." - Jésus se livre à
ses bourreaux "comme un agneau, sans ouvrir la bouche".
La torture de ce crucifiement des mains et des pieds est inexprimable.
Qui pourrait dire surtout les sentiments du Cur sacré
de Jésus au milieu de ces tourments? Il devait répéter
sans doute la parole qu'il avait dite en entrant en ce monde:
"Père, vous ne voulez plus d'holocaustes d'animaux:
ils sont insuffisants pour reconnaître votre sainteté
mais vous m'avez donné un corps. Me voici!" Jésus
regarde sans cesse la face de son Père, et avec un incommensurable
sentiment d'amour, il livre son corps pour réparer les
insultes faites à la majesté éternelle. On
le crucifie entre deux larrons. "Il s'est
fait obéissant jusqu'à la mort." Et quelle
mort subit-il? La mort de la croix. Pourquoi cela? Parce qu'il
est écrit: "Maudit soit celui qui est suspendu au
gibet." Il a voulu être mis "au rang des scélérats",
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afin
de reconnaître les droits souverains de la sainteté
divine.
Il se livre aussi pour nous. Jésus, étant Dieu,
nous voyait tous en ce moment; il s'est offert pour nous racheter
parce que c'est à lui, pontife et médiateur, que
le Père nous a donnés. Quelle révélation
de l'amour de Jésus pour nous! "Il n'y a pas de plus
grand amour que de donner sa vie pour ses amis." Il n'aurait
pu faire davantage: "Il les aima jusqu'à la fin."
Et cet amour, c'est aussi l'amour du Père et de l'Esprit
Saint, car ils ne sont qu'un.
Ô Jésus, qui "en obéissant à la
volonté du Père et par la coopération du
Saint-Esprit, avez donné la vie au monde par votre mort,
délivrez-moi, par votre corps infiniment saint et votre
sang, de toutes mes fautes et de tous mes maux: faites que je
m'attache inviolablement à votre loi et ne permettez pas
que je me sépare jamais de vous".
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12e
Station
Jésus meurt sur la croix
"Et
criant d'une voix puissante, Jésus dit: Père, je
remets mon âme entre vos mains. Et ayant dit ces paroles,
il expira." - Après trois heures de souffrances indicibles,
Jésus meurt. "La seule oblation digne de Dieu, l'unique
sacrifice qui rachète le monde et sanctifie les âmes
est accompli."
Le Christ Jésus avait promis que, "quand il aurait
été élevé sur la croix, il attirerait
tout à lui". Nous sommes à lui à un
double titre: comme créatures tirées du néant
par lui, pour lui; - comme des âmes "rachetées
par son sang" précieux. Une seule goutte du sang de
Jésus, Homme-Dieu, aurait suffi pour nous sauver, car tout
en lui a une valeur infinie; mais, parmi tant d'autres raisons,
il a voulu le répandre jusqu'à la dernière
goutte en faisant percer son Cur sacré, afin de nous
manifester l'étendue de son amour. - Et c'est pour nous
tous qu'il l'a versé; chacun peut redire en toute vérité
la brûlante parole de saint Paul: "Il m'a aimé,
et s'est livré pour moi!"
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Demandons-lui de nous attirer à son Cur sacré
par la vertu de sa mort sur la croix; demandons-lui de mourir
à nos amours-propres, à nos volontés propres,
sources de tant d'infidélités et de péchés,
et de vivre pour celui qui est mort pour nous. Puisque c'est à
sa mort que nous devons la vie de nos âmes, n'est-il pas
juste que nous ne vivions que pour lui?
Ô Père, glorifiez votre Fils suspendu au gibet. Puisqu'il
s'est abaissé jusqu'à la mort et à la mort
de la croix, élevez-le; que soit exalté le nom que
vous lui avez donné; que tout genou fléchisse devant
lui; que toute langue proclame que votre Fils Jésus vit
désormais dans votre gloire éternelle!
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13e
Station
Le corps de Jésus est descendu de la croix et remis à
sa mère
Le
corps meurtri de Jésus est rendu à Marie. Nous
ne pouvons imaginer la douleur de la Vierge à ce moment.
Jamais mère n'a aimé son enfant comme Marie a
aimé Jésus; son cur de mère a été
façonné par l'Esprit Saint pour aimer un Homme-Dieu.
Jamais cur humain n'a battu avec plus de tendresse pour
le Verbe incarné que le cur de Marie; car elle
était pleine de grâce, et son amour ne rencontrait
point d'obstacle à son épanouissement.
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Puis elle devait tout à Jésus; son immaculée
conception, les privilèges qui font d'elle une créature
unique lui avaient été donnés en prévision
de la mort de son Fils. Quelle douleur inexprimable fut la sienne,
lorsqu'elle reçut dans ses bras le corps ensanglanté
de Jésus!
Jetons-nous à ses pieds pour lui demander pardon des
péchés qui furent la cause de tant de souffrances.
"Ô Mère, source d'amour, faites-moi comprendre
la force de votre douleur, afin que je partage votre affliction;
faites que mon cur soit embrasé d'amour pour le
Christ, mon Dieu, afin que je ne songe qu'à lui plaire!"
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14e
Station
Jésus est déposé dans le tombeau
"Joseph
d'Arimathie, ayant descendu de la croix le corps de Jésus,
l'enveloppa d'un linceul, et le déposa dans un sépulcre
taillé dans le roc où personne n'avait encore été
mis."
Saint Paul disait que le Christ devait nous être semblable
en toutes choses; jusque dans sa sépulture, Jésus
est l'un des nôtres: on l'ensevelit, dit saint Jean, à
la manière des Juifs, avec des linges et des aromates.
Mais le corps de Jésus, uni au Verbe, "ne devait pas
souffrir la corruption". Il restera à peine trois
jours dans le tombeau; par sa propre vertu, Jésus en sortira
triomphant de la mort, resplendissant de vie et de gloire, et
"la mort n'aura plus d'empire sur lui".
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L'Apôtre nous dit encore que "par notre baptême
nous avons été ensevelis avec le Christ pour mourir
au péché". Les eaux du baptême sont comme
un sépulcre où nous devons laisser le péché,
et d'où nous sortons, animés d'une nouvelle vie,
la vie de la grâce. La vertu sacramentelle de notre baptême
dure toujours. En nous unissant par la foi et l'amour au Christ
déposé dans le tombeau, nous renouvelons cette grâce
de "mourir au péché afin de ne vivre que pour
Dieu".
Seigneur Jésus, que j'ensevelisse dans votre tombeau tous
mes péchés, toutes mes fautes, toutes mes infidélités;
par la vertu de votre mort et de votre sépulture, donnez-moi
de renoncer de plus en plus à tout ce qui m'éloigne
de vous, à Satan, aux maximes du monde, à mes amours-propres;
par la vertu de votre résurrection, faites que, comme vous,
je ne vive plus que pour la gloire de votre Père!
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Ô
Jésus, que votre croix soit mon refuge et mon salut!
Tout le mystère du Christ durant les jours
de sa Passion peut se résumer dans cette parole de saint
Paul: "Il s'est humilié, s'étant fait obéissant
jusqu'à la mort." Nous avons vu jusqu'à quel
point le Christ s'est abaissé; il a touché le fond
de l'humiliation, il a choisi "la mort d'un maudit",
ainsi qu'il était écrit: "Maudit soit quiconque
est pendu au gibet."
Mais ces abîmes d'ignominies et de souffrances dans lesquels
notre Seigneur a bien voulu descendre étaient également
des abîmes d'amour; et cet amour nous a mérité
la miséricorde de son Père, toutes les grâces
de salut et de sanctification.
Si le mot d'humiliation résume le mystère de la
Passion, il y a une parole, de saint Paul également, qui
récapitule pour le Christ le mystère de sa résurrection:
"Il vit pour Dieu"; il vit: il n'y a plus désormais
en lui que vie parfaite et glorieuse, sans infirmité ni
perspective de mort. "Désormais il ne meurt plus,
la mort n'exerce plus de pouvoir sur lui": vie tout entière
pour Dieu, plus que jamais vouée à son Père
et à sa gloire.
Tels sont les aspects les plus profonds de la grâce pascale:
détachement de tout ce qui est humain, terrestre, créé;
pleine appartenance à Dieu par le Christ. La résurrection
du Verbe incarné devient pour nous un mystère de
vie et de sainteté. Le Christ, étant notre chef,
"Dieu nous a ressuscités avec lui". Nous devons
donc chercher à reproduire en nous les traits qui marquent
sa vie de ressuscité.
C'est à quoi saint Paul nous exhorte avec tant d'insistance
en ces jours. "Si, dit-il, vous êtes ressuscités
avec le Christ, c'est-à-dire si vous voulez que le Christ
vous donne part au mystère de sa résurrection, si
vous voulez entrer dans les sentiments de son Cur sacré,
si vous voulez "manger la Pâque" avec lui, et
partager un jour sa gloire triomphale, "recherchez les choses
d'en-haut, affectionnez-vous aux choses du ciel qui demeurent,
détachez-vous de celles de la terre", qui sont fugitives:
les honneurs, les plaisirs, les richesses. "Car vous êtes
morts au péché, et votre vie est cachée avec
le Christ en Dieu... Et de même que le Christ ressuscité
ne meurt plus, mais vit à jamais pour son Père,
ainsi mourez au péché et vivez pour Dieu par la
grâce du Christ."
___________
(*) Les présentes méditations sur
les stations du chemin de la croix sont extraites de l'uvre
"Le Christ dans ses mystères", du bienheureux
Dom Columba Marmion, osb, Abbé de Maredsous, béatifié
par le Pape Jean-Paul II en l'an 2000.
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